TRADITIONS Traditions et légendes de la Belgique - (10) - Octobre


Octobre
"Shepheardes Calender" de Edmund Spenser (1579)



TRADITIONS ET LÉGENDES DE LA BELGIQUE


Otto von Reinsberg-Düringsfeld 


OCTOBRE.


Le dixième mois de l'année, qui était le huitième dans l'ancien calendrier, comme son nom l'indique, a conservé en flamand le nom de « wijnmaend, » mois des vendanges, que Charlemagne lui donna, quoique depuis longtemps la vigne ait disparu du pays flamand. Les autres dénominations, telles que « aerzelmaend, » mois de déclin (du verbe « aerzelen, » hésiter, reculer), « herselmaend, » « rozelmaend » mois de la graisse (de « russel ou roetsel, rosel, » graisse) et « eiker ou eikelmaend, » mois des glands, sont plus ou moins tombées en désuétude.

Les Anglo-Saxons désignaient ce mois du nom de « vintirfyllith.» commencement de l'hiver.

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1er octobre.

(Amaryllis humilis.) Saint Bavon; saint Piat; saint Remy.


Saint-Remy, surnommé l'apôtre des Francs, des mains duquel Clovis reçut le baptême, dans la cathédrale do Notre-Dame de Rheims, est très-vénéré en Belgique, où plus de quatre-vingts églises sont consacrées en son honneur.

Saint-Piat, dont nous aurons encore l'occasion de parler, fut martyrisé vers l'an 287.

Saint-Bavon, auquel vingt-trois églises sont dédiées, est le patron du diocèse de Gand.

Alloïn, qu'on surnomma Bavon à cause de son amabilité, était un seigneur riche et puissant de la Hesbaie, allié de près à l'illustre famille des Pépins.

Quelques auteurs prétendent qu'il se nommait « Adhileth » et qu'il devait le surnom de « Allowyn, » qui vainc tout, et l'épithète de brigand redoutable, que ses biographes lui ont donné, à la féroce énergie de son caractère et à ses exploits militaires.

Il est très-probable, que les chants de Halewyn, des plus populaires de la Flandre et du Brabant, et en même temps des plus anciens, qui nous soient parvenus, rappellent les aventures de ce terrible jar.

Mais le farouche guerrier ne put résister à l'éloquente parole de saint Amand, et après le décès de sa femme, il renonça entièrement au monde, distribua de grands biens aux pauvres et aux églises et fonda à Gand, en l'honneur de saint Pierre, une abbaye qui prit son nom dans la suite. Devenu membre du clergé, il n'en devint que plus désireux de cacher sa vie un chêne creux de la forêt de Mendonck devint sa demeure, un peu de pain et d'eau lui suffirent pour sa nourriture.

Revenu au monastère, il se fit enfermer dans une cellule, où il pouvait à peine se tenir debout et y continua sa vie de recueillement et de contemplation, sans refuser cependant des conseils à ceux qui recouraient à son expérience.

Il mourut en 654 le 1er octobre, jour où l'on célèbre sa fête principale, et son corps fut élevé par saint-Éloi [1].

A Gand, où depuis 1336, en vertu d'une ordonnance de l'évêque de Tournai, André Ghine, la fête de saint Bavon se célèbre avec la plus grande solennité, le curé de Saint-Jacques allait jadis, tous les ans, à l'offrande, dans l'oratoire de Saint-Bavon, pour présenter à l'abbé un cierge du poids d'une livre avec une monnaie d'argent [2].

A Bouchout, en Brabant, où le chapitre de Saint-Bavon de Gand possédait de grands biens et prélevait les dîmes, l'église de Saint-Bavon attire ce jour un grand concours de pèlerins. On y invoque saint Bavon pour la coqueluche et lorsque dans les environs, un enfant est attaqué de cette maladie, la mère s'empresse de le transporter à l'église de Bouchout, où le curé ou son vicaire dit quelque prière et laisse boire à l'enfant quelques gouttes d'eau bénite contenue dans une corne, appelée « la corne de saint Bavon. »

D'ancienne date on avait dans la Campine la coutume de laisser commencer ou renouveler les baux des fermes, métairies et terres en culture le 1er octobre ou « Bamis » et ce bail avait pour nom « Baefmishuer, » parce qu'il y avait des baux qui dataient del Noël (« Kersmishuer ») et d'autres datant de la mi-mars appel, « Halfmaerthuer. » Par ces dénominations flamandes les campagnards connaissaient d'avance la diversité des stipulations selon les coutumes de Lierre [3].

A Bruxelles, suivant une ancienne fondation à l'église de Saint-Nicolas, le 1er octobre, après la célébration d'une messe solennelle, un homme montait sur la tour de l'église, et jetait de là dans la rue, plusieurs sacs de noix.

Cette fondation, dont on ne connaît pas l'origine, fut remplacée en 1760, par une distribution d'argent aux pauvres [4].

Les habitants de Bergues et autres lieux avaient l'habitude de payer tous les ans aux comtes de Flandres, le jour de saint Bavon, un tribut de douze deniers parisis. Mais Marguerite de Constantinople, qui mourut en 1279 très-regrettée à cause de sa charité, les en déchargea [5].

A Diest avait lieu l'élection annuelle des échevins.

Le magistrat de cette ville se composait, depuis 1289, d'un drossart (drossaert), d'un bailli ou écoutète (schout, scutterus), de deux bourgmestres (burgmeesters), de sept échevins (schepenen), de dix membres du conseil (raedslieden), d'un pensionnaire (pensionaris) et d'un secrétaire. A l'exception des membres du conseil, que le peuple divisé en 22 métiers ou « ambachten » choisissait lui-même, le seigneur de la ville nommait tous les membres du magistrat. Le drossart et l'écoutète étaient nommés à vie, les bourgmestres et les échevins changeaient chaque année. Les réunions et résolutions des bourgmestres, des échevins et des membres du conseil, s'appelaient comme ailleurs « weth en de raedt. » Le « weth en de raedt, » administraient la ville, et nommaient les autres officiers de la commune, comme les deux trésoriers (rentmeesterS) les quatre marguilliers (kerkmeesters) les quatre « H. geestmeesters » les 2 architectes, etc. [6].

A Malines se tient l'une des deux foires que le duc Jean de Bourgogne accorda à la ville, le 15 avril 1409. Elle s'appelle «Baefmisse, » foire de saint Bavon. Dans le principe elle ne devait durer que huit jours, mais à présent elle se prolonge jusqu'à quinze jours.

A Neder-Zellick, hameau près de Bruxelles, sur la chaussée qui conduit de cette ville à Gand, la lie du peuple de Bruxelles va tous les ans se disputer le prix de la gourmandise; une dent d'or est donnée en prix au malheureux qui dévore le plus d'aliments. Cette fête qui s'est quelquefois célébrée à Dilbeek, s'appelle « smochterkermis, » et se rattache sans doute aux festins qui avaient jadis lieu, le jour de saint Bavon, jour où se tenait dans les villages un des trois grands plaids seigneuriaux [7].

De même que pour les Flamands la saint Bayou ou « Bamis, » la saint Remy sert aux Wallons de terme de payement pour les ventes.

A Mons les comptes du chapitre des chanoinesses de Sainte-Waudru étaient rendus, chaque année, à la saint Remy, et à Namur, au siècle dernier l'échéance des rentes était encore fixée au même jour.

Aussi dans la plupart des villes la saint Remy, à l'égard de la Bamis, mit-elle fin aux tirs et aux exercices d'été des différents serments.

A Courtrai, le seigneur de Spiere ou son député devait autrefois, le jour de saint Remy, entre le lever du soleil et midi, comparaître devant la maison des échevins, monté à cheval, revêtu d'une cotte d'armes rouge, nu-tête et une épée nue en main, et déclarer venir pour faire amende de l'offense commise par Allard, sire de Spiere au comte de Flandre, et à la ville de Courtrai, en 1351.

Ce fut dans cette année que, dans un bois tout près de Spiere, village à trois lieues de Courtrai, un citoyen de cette ville, Karel Dinghe, tisserand de son métier, qui y alla le jour de la Chandeleur, voir un parent malade, fut arrêté par les gardes-forêt du seigneur de Spiere, accusé faussement de braconnage et mis en prison, bien que suivant les privilèges de Courtrai, aucun bourgeois de cette ville ne pût être jugé et puni que par les échevins de Courtrai.

En apprenant cette nouvelle, le magistrat de Courtrai expédia un messager avec une lettre munie du grand scel de la ville au seigneur de Spiere, afin de réclamer ses droits. Mais Allard, sire de Spiere, qui s'était déjà rendu odieux dans toute la contrée par sa violence, renvoya le messager après l'avoir forcé de manger toute la lettre avec le scel.

Le magistrat, encore plus irrité de cette nouvelle offense, s'en plaignit à Louis de Mâle, comte de Flandre, et celui-ci, après s'être informé du fait, donna, le 4 mars 1351, à Deynze un décret, qui se trouve encore aux archives de la ville de Courtrai et qui mérite bien d'être communiqué en entier. Le voici  :

« Nous, Loys, comte de Flandres, de Rethel et de Nevers, faisons savoir à tous que comme pour cause que ia piecha Messires Allard, sires Despire, en grand grief et vitupere de nos bonnes gens, prevosts, échevins et communautté de nostre ville de Courtray...

« Avons par bon et meur advys de conseil sur ce eu, en forme de rigeur, mais en la plus gratieuse manière que nous pouvons, bonnement ordonné, sententié et jugé, ordonnons, sententions et jugeons, que le susdict sire d'Espiere et ses hoirs et successeurs seigneurs d'Espiere, sont et seront tenus à tousiours mais perpétuellement de venir en nostre ville de Courtray devant la maison des échevins le jour de saint Remy entre soleil levant et none en leurs personnes ou envoyeront un souffisant homme monté sur un cheval souffisant vestu d'un vermeisse cote teste decouverte et un espé nue en sa main disans qu'en amendise don faict que jadis les sires d'Espiere fist en contre nous et à nostre ville de Courtray de ce qu'il fist manger le messagier de nostre dicte ville, la lettre et scel qu'il y envoyoit il vient à ceste estat; item avons nous jugé et ordonné que le susdict sire d'Espiere payera audict messagier dedans le jour de grand Pâques prochain venant soixante livres parisis pour les griefs qui luy fut fais comme dict est, lesquelles choses nous promectons faire ratifier et promectre le dict seigneur d'Espiere amchois qu'il soit delivré de la prison où il est à présent... En tesmoing des choses dessus dictes et pour ce qu'elles soient fermes estables et bien tenues nous avons a ces lettres fait mettre nostre dict scel.

« Donné à Donze, la veille de saint Adrien, l'an MCCCLI [8]. »

A Merchten, tous les ans à la saint Remy, les doyens et les jurés de la gilde de la draperie devaient rendre compte au magistrat de la ville.

Ce métier « gulde van de drapperyen ende lakenen, » a été établi et doté de privilèges et de droits par Antoine, duc de Brabant, Lorraine et Limbourg en 1409. Il avait un doyen « deken, » trois jurés « gesworenen » et un valet « knaep, » qui l'administraient et dont l'élection dépendait du magistrat. Chaque pièce de drap devant payer un gros , pour être scellée, le duc recevait la troisième partie de ce revenu, la ville et le métier, les deux troisièmes. La même chose avait lieu au partage des amendes [9].

L'ancienne abbaye de Saint-Remy, près de Rochefort, une des plus belles et des plus riches du pays, fut fondée en 1206 par Gilles de Looz, comte de Duras, Clermont, Rochefort, etc. Des religieuses de l'ordre de Cîteaux du monastère de Félix-Pré, près Givet, y furent établies, mais retournèrent en 1464 à l'instance de Louis de Lamarck, comte de Rochefort, à Félix-Pré remplacer les religieux du même ordre qui s'y trouvaient et qui se rendirent à Saint-Remy.

L'abbaye, enrichie par de nombreuses donations, fut pillée par les Lorrains en 1650, mais eut peu à souffrir sous la république, et les religieux au nombre de neuf, rentrés de l'émigration, furent remis en possession de leurs biens en 1796.

Dans l'église, dont on ne voit plus qu'une partie du portail, étaient les tombes des comtes de Rochefort [10].

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2 octobre.

(Saponaria officinalis.) SS. Anges gardiens.


Dans l'origine on célébrait cette fête simultanément avec celle de saint Michel, archange, le 29 septembre, mais depuis environ deux cents ans elle a été transférée au 2 du mois d'octobre.

Ce jour-là, il y avait annuellement à Bruxelles, une procession sortant de l'église des Dominicains, et à laquelle on portait la statue de Jésus-Christ. Après quelques tours de rue, la procession repassait devant la même église d'où sortait alors la statue de la Vierge, et au moment où cette image approchait de celle de notre Seigneur, on lui levait le voile et on lui faisait faire une révérence. Puis, les deux statues accompagnaient la procession qui continuait sa marche. Au commencement du dix-huitième siècle où il fut mis fin à tant de processions, on fit également cesser celle-ci [11].

Dans les douze communes, dont les églises paroissiales sont consacrées en l'honneur de saint Léger, on célèbre la fête de ce saint évêque d'Autun, qui a donné son nom à deux villages, dont l'un est situé dans le diocèse de Namur, et l'autre dans celui de Tournai.

A Enghien, dans le Hainaut, commence ce jour-là une foire qui est assez considérable et dure dix jours.

Suivant une croyance populaire, qui est facile à expliquer, les laboureurs n'aiment pas à semer le jour de saint Léger, de peur que les épis ne soient trop légers [12].

A Namur commençait autrefois la foire franche, dite « fête de Herbattes » qui durait jusqu'au 27 octobre.

Cette foire, que l'on trouve mentionnée dans un manuscrit de 1265, paraît d'origine fort ancienne, bien qu'on ne connaisse pas la charte qui l'institue. Au seizième siècle elle s'ouvrait la veille de la saint Denis, mais vers le milieu du dix-septième siècle, elle fut remplacée par la foire actuelle qui se tient depuis le 2 juillet jusqu'au 16 du même mois [13].

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3 octobre.

(Helenium pubescens.) Saint Cyprien;
saint Denis; saint Gérard; saint Piat.


Saint Gérard, issu de la famille des ducs d'Austrasie, fonda la célèbre abbaye des Bénédictins à Brognes, où il mourut en 958 comme premier abbé et où il fut depuis honoré comme patron.

Saint Piat, l'un des saints patrons de Tournai, naquit à Bénévent en Italie, se distingua dès son enfance par ses vertus et sa sainte vie et vint avec saint Quentin en France pour y propager la foi. Saint Quentin l'ayant envoyé en 284 à Tournai, afin d'y dissiper les ténèbres du paganisme, saint Piat y convertit en moins de six semaines plus de trente mille personnes, y jeta les premiers fondements de l'église de Notre-Dame dans le lieu même, où se trouve aujourd'hui la cathédrale, et devint le premier évêque de Tournai. Mais pendant la cruelle persécution des chrétiens sous l'empire de Dioclétien, saint Piat fut pris par les soldats romains et souffrit le martyre. La légende raconte, qu'après d'horribles supplices, on lui trancha le sommet de la tête et l'abandonna, croyant qu'il était mort, sur la place où se voit maintenant l'église qui lui est dédiée, mais que, les meurtriers s'étant éloignés, le saint se leva, recueillit le sommet de sa tête et se retira, au grand étonnement des habitants de la ville, jusqu'à un endroit bocageux du pays Mélantois, qui s'appelait Sacellin, où il rendit son âme à Dieu près d'une fontaine, qui guérit encore aujourd'hui beaucoup de maladies.

Quoique saint Piat fût le premier apôtre du Tournaisis, il n'y a que trois églises dans tout le diocèse qui portent son nom et la célébration de sa fête est transférée au premier dimanche d'octobre [14].

Parmi les foires qui se tiennent ce jour-là, celle de Nieuport, accordée à cette ville en 1364, est l'une des plus considérables.

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4 octobre.

(Artemisia aproxanum.) Saint François d'Assise.


Bien qu'il n'y ait en Belgique que peu d'églises consacrées en l'honneur du saint fondateur des Frères mineurs, il y existe encore un grand nombre de communautés pieuses d'hommes et de femmes qui célèbrent en ce jour la fête de leur patron.

Les Récollets, autre espèce de Cordeliers qui formaient pour ainsi dire une fraction dans les règles de saint François, disaient à Gand certaines messes appelées en flamand « Keer-messen » par la vertu desquelles on retrouvait les effets perdus ou égarés; ils récitaient aussi certaines prières très-efficaces pour les femmes qui concevaient difficilement, c'est pourquoi on les nommait vulgairement les frères de l'amour « de minnebroeders » [15].

Les paysans des Flandres attribuent encore aujourd'hui aux Récollets le pouvoir de faire changer le vent en cas d'incendie et de faire cesser des épizooties [16].

Le même jour se célèbre la fête de saint-Amour, patron de Munsterbilsen, au pays de Limbourg, et de Cortenaeken, près de Diest. Ce saint, originaire d'Aquitaine, fut diacre et accomplit de grands travaux apostoliques dans la Hesbaye, qu'il arracha en partie à l'impiété. Il se livra ensuite, pendant plusieurs années, près du sépulcre de saint Servais, à la contemplation des choses divines et se transporta de là à Bilsen, où il mena une vie aussi austère que pieuse, fit différents miracles et mourut en odeur de sainteté. Après sa mort il fut vénéré comme le patron titulaire du couvent et son corps y était conservé avec de grands honneurs. Le comte Odulphe ou Alodulphe, que l'on croit avoir été un des premiers comtes de Looz, fît bâtir, vers l'an 850, une nouvelle église à côté de celle de Sainte-Landrade et la dédia à saint Amour. Il y fit aussi transporter les reliques de ce saint, qui jusques-là avaient été conservées à Maestricht et c'est cette même église qui plus tard devint l'église collégiale des dames chanoinesses.

Depuis ce temps la fête de saint Amour était célébrée avec grande solennité et une dame, du nom de Regenera, appartenant sans doute aux rangs élevés de la société, choisit ce jour pour une fondation toute particulière.

Dans le diplôme concernant cette donation, et daté de l'an 1040 elle déclara, pour le salut de son âme et la protection de sa postérité, se constituer en servante ou esclave de saint-Amour, à charge de lui payer une rente annuelle le jour de sa fête et imposa la même obligation à tous ses descendants, pourvu que celui qui s'acquitterait de ce devoir fût marié un an et un jour [17].

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5 octobre.

 (Bottonzia asteroides.) Sainte Flavie; saint Placide.


Le premier dimanche d'octobre se célèbre la fête du saint-Rosaire ou « O. L. V. Roosekrans. » Cette fête, qui d'abord se chômait le 7 octobre, date du temps de saint Dominique. Le Rosaire établi par lui et propagé par les religieux de son ordre fut reçu avec enthousiasme par les populations catholiques. Il se forma des confréries sous ce titre dans toutes les maisons des frères prêcheurs et un jour fut consacré spécialement au saint-Rosaire. Lorsque plus tard la fête de Notre-Dame de la Victoire fut réunie à celle du Rosaire, la fête fut transportée, en 1573, au premier dimanche d'octobre et étendue à tout l'univers catholique par le pape Clément XI, en 1671 [18].

Dans la plupart des villes belges, une procession va en l'honneur de Notre-Dame du Rosaire dans l'intérieur des églises. En quelques endroits, entre autres à Namur, où la fête du Rosaire se chôme dans l'église de Saint-Loup, cette procession parcourt la paroisse.

A Fosses (diocèse de Namur) se fait ce jour-là une grande procession en l'honneur de saint Feuillen, patron de l'église, dont la châsse, qui contient son corps depuis le septième siècle, est portée dans les campagnes voisines. La jeunesse de l'endroit se met sous les armes et quelques villages des environs font de même et viennent augmenter la splendeur de la procession, qui est d'autant plus solennelle qu'elle n'a lieu que tous les sept ans.

A Nivelles se fait chaque année, le premier dimanche d'octobre, la grande procession qui attire encore de nos jours une foule d'étrangers. Elle se fait à peu près avec les mêmes cérémonies qu'autrefois.

A Stockheim, à deux lieues de Maeseyck, le premier dimanche d'octobre s'appelle généralement « Sintermys » parce qu'on y célèbre ce jour-là la fête de saint-Remy ou sint-Remigius qui donne en même temps lieu au commencement de la grande kermesse [19].

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6 octobre.

(Pyrethrum scrotinum.) Saint Brunon.


Saint-Brunon, mort en 1101, est le fondateur des Chartreux dont nous avons déjà énuméré les maisons en Belgique sous la date du 9 janvier.

La cérémonie dite « Keersbegieting » qui a encore lieu à Ypres le soir du premier lundi d'octobre de chaque année, a été décrite sous le premier septembre.

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7 octobre.

(Chrysanthemum indicum.) Saint Marc, pape;
saint Auguste; saint Serge.


Ce fut en mémoire de la célèbre victoire de Lépante, remportée sur les Turcs par Juan d'Autriche, le 7 octobre 1571, précisément au jour du saint-Rosaire, que Pie V institua la fête de « Notre-Dame de la Victoire, » qui fut ensuite transportée au premier dimanche d'octobre par Grégoire XIII son successeur, sous le titre de « fête du saint-Rosaire » [20].

L'anniversaire de ce beau fait d'armes des chrétiens se célébrait à Anvers par une procession solennelle dite « Keèrkens processie » qui se faisait ce soir dans l'ancienne église des Dominicains, maintenant église paroissiale de Saint-Paul, où se voient encore quelques tableaux représentant la bataille de Lépante.

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8 octobre.

(Actillea ageratum.) Sainte Brigitte;
sainte Pélagie; sainte Reinfrède.


Sainte Reinfrède, qui érigea en l'honneur de la Vierge l'abbaye de Denain, est patronne de quelques églises situées dans le diocèse de Namur.

Sainte Brigitte, en l'honneur de laquelle deux églises sont consacrées, fonda l'ordre qui portait son nom et qui comptait en Belgique les maisons du Trône de Marie à Termonde, érigée par Isabelle de Portugal, en 1465; de Sainte-Marie-de-Foi, près de Poperinghe; de Sainte-Marie-aux-Fonts, à Peruwelz, les couvents de Bruxelles, d'Anvers et de plusieurs autres villes [21].

Suivant la croyance populaire répandue en Flandre et en Brabant, l'eau qu'on donne ce jour aux pauvres, se change pour celui qui la donne en vin [22].

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9 octobre.

(Agaricus lactiflorus.) Saint Denis, évêque et ses compagnons;
saint Ghislain.


Saint Denis, en l'honneur duquel trente-sept églises sont consacrées, a donné son nom à trois communes [23] et est honoré comme patron dans la ville de Diest.

Saint Ghislain, auquel sept églises sont dédiées, vint d'Athènes à Rome et de là au pays de Hainaut qu'il illustra par la sainteté de sa vie et le nombre des miracles qui s'y opérèrent par son intercession. Il y bâtit un magnifique monastère de l'ordre de saint Benoît, qui donna l'origine à la ville qui porte à présent le nom de Saint-Ghislain, son patron.

Les membres de la célèbre confrérie de saint Ghislain, qui se répandit par tous les Pays-Bas, payaient chaque année un tribut à son monastère, en marque de leur servitude. Car ils se regardaient en quelque sorte comme ses esclaves et renonçaient à leur liberté. Aussi les plus illustres familles du pays se rendirent-elles vassalles de saint Ghislain et vinrent au pied de ses autels se livrer entre les mains de l'abbé comme féodales de l'Église, et lier leurs serviteurs, en les affranchissant en faveur du même saint [24].

La foire qui se tient à Saint-Ghislain, le jour de la fête du saint patron, est très-fréquentée.

A Mons on conduisait, le jour de saint Ghislain, les enfants à l'église, où le prêtre leur apposait son étole sur la tête, en leur faisant lecture d'un passage de l'Évangile, cette pratique religieuse avait pour but de les préserver des maladies convulsives. A la porte de l'église, des boutiques offraient des joujous et des bonbons, dont les parents achetaient pour en gratifier leurs enfants; c'était une foire d'une matinée [25].

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10 octobre.

(Velthemia viridifolia.) Saint François de Borgia;
saint Géréon; saint Paulin.


Une seule chapelle à Deux-Acren, paroisse du diocèse de Tournai, est dédiée à saint Géréon. A Louvain les meuniers célébrèrent longtemps, en ce jour, la fête de saint Victor, leur patron, dans l'église de Saint-Quintin, jusqu'à ce qu'ils s'aperçurent que leur patron n'était pas saint Victor, martyrisé à Xanten, mais l'autre saint de ce nom, dont la fête a lieu le 21 juillet.

A Liége les « Bouteux-fou » ou déchargeurs des bateaux de la Meuse font dire une messe dans l'église de Saint-Denis, le jour après la fête de ce saint qu'ils honorent comme leur patron. C'est le seul métier de Liége qui célèbre encore sa fête patronale.

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11 octobre.

(Ilex aquifolium.) Saint Gomer ou Gommaire,
patron de la ville de Lierre.


Ce saint, qu'à Malines les boursiers ou les gantiers ont choisi pour patron, naquit en 717 à Emblehem, village situé à une lieue de Lierre, où se trouvait un château de sa famille [26].

Ayant été dès son jeune âge instruit dans la doctrine chrétienne, il devint un valeureux capitaine sous le roi Pepin. Après avoir quitté la carrière des armes il voulait se rendre à Rome, lorsqu'il fut averti d'une manière miraculeuse qu'il devait se retirer dans un forêt voisine et y bâtir une chapelle, dans laquelle il vivrait et mourrait. Il se rendit donc dans cette forêt appelée alors Nives-donck, depuis Ledon, où il construisit une église en l'honneur de saint Pierre. Ce saint homme y vaquait jour et nuit à la contemplation divine. Pour complaire au roi Pepin, Gommaire avait épousé une femme nommée Grimuaire qui ne lui convenait pas du tout, car autant il était libéral envers les pauvres et débonnaire envers ses sujets, autant elle était avare et méchante. Il tâcha de la gagner par la patience et la prudence. Un jour durant la moisson, ses sujets étant fort affligés d'une soif ardente et n'ayant pas d'eau dans le voisinage, Gommaire les consola par une fontaine qu'il fit jaillir en frappant la terre de son bâton, et qui se voit encore aujourd'hui à Emblehem, où le saint mourut le 11 octobre 774 et fut inhumé après sa mort. Mais depuis son corps, selon une révélation qu'eut sainte Vrachilde, fut transporté dans l'église que le saint avait fait construire dans la forêt et qui est maintenant la collégiale de Lierre.

La fête de saint Gommaire attire chaque année un concours immense de fidèles à Lierre qui y affluent pour invoquer le saint contre les hernies ou « breuken. »

La légende raconte que saint Gommaire rétablit un arbre, que ses gens avaient abattu, dans son état primitif, en ramassant les débris et en les entourant de son ceinturon. Ce ceinturon se conserve encore dans la collégiale de Lierre et les prêtres s'en servent pour donner l'accolade aux personnes qui, pendant l'octave de la fête de saint Gommaire, s'y présentent pour baiser l'extérieur d'un petit reliquaire contenant un osselet du saint.

Aussi tout le monde se rend-il l'un ou l'autre des jours de la huitaine de la saint Gommaire à la chapelle appelée « la fontaine de saint Gummar » qui depuis 1477 se trouve dans une espèce de ravin à une distance de trois kilomètres au nord de Lierre sur le sol d'Emblehem. Là on descend dans le souterrain pour y puiser, au moyen d'un vase en fer, de l'eau dans la fontaine qui doit, d'après la légende, son origine à saint Gommaire et à laquelle le peuple attribue des vertus extraordinaires.

Pour les habitants de la ville de Lierre, ce pèlerinage est une espèce de fête. Ils vont à Emblehem, où la saint Gommaire donne lieu à la kermesse de la commune, prient quelques instants dans la chapelle de Saint-Gommaire, y boivent quelques gouttes de l'eau de la fontaine et puis, en retournant chez eux, ils s'amusent au faubourg Lisp, à boire et à danser, comme entre le 20 et le 28 août cela s'y faisait à l'occasion de la fête de saint Bernard [27].

Suivant une ancienne coutume, les habitants de la ville d'Enkhuizen en Nord-Hollande, où la grande église était, avant de devenir temple calviniste en 1575, dédiée à saint Gommaire et s'appelle encore aujourd'hui « de Gommerskerk, » envoyaient chaque année à la saint Gommaire une députation à Lierre qui assistait à la grande procession qui s'y faisait en l'honneur du saint patron et jouissait du privilège d'y porter quelque temps la châsse du saint.

Le même droit était accordé aux députés qui venaient ce jour de la part des fendeurs de bois d'Anvers et de Gand, qui honoraient saint Gommaire comme patron. Mais depuis que les troubles de la guerre des iconoclastes mirent fin à ces députations, le magistrat de la ville seul portait les reliques de saint Gommaire.

Après la procession on faisait représenter, depuis 1428, des mystères sur la Grand'place. Les acteurs ou « gezellen » qui les représentaient venaient d'abord d'Anvers ou de Malines et recevaient du magistrat, en récompense de leur peine, du vin et de l'argent, mais, en 1478, il se forma à Lierre une chambre de rhétorique sous le titre « De groeijende boom » l'arbre croissant, qui se plaça sous la protection du saint patron de la ville et représenta en 1479, à l'occasion de sa fête, pour la première fois le jeu de Saint-Gommaire ou « het spel van Sint Gommar. » Le magistrat la remboursa de ses frais en lui payant une somme de deux livres de gros et lui assigna un présent annuel consistant en trois « paternoster, » dont elle aurait à recevoir deux le jour de Saint-Gommaire, et le troisième à l'occasion de la fête patronale de l'autre chambre de rhétorique de la ville qui bientôt après s'établit sous le titre « de Jenette bloem » (la jonquille) ou « de Ongeleerden » (les ignorants).

Outre cela, le magistrat de Lierre avait encore plusieurs présents à faire le jour de la procession.

Nous trouvons dans les comptes de la ville, qu'il distribua en 1426, trois douzaines de chapeaux et sept douzaines de gants et en 1491, neuf douzaines de gants et trente-huit chapeaux.

Les serments ou gildes, qui en 1401 accompagnèrent pour la première fois la procession de saint Gommaire, réclamèrent également les libéralités du magistrat [28].

Les paysans brabançons considèrent le jour de saint Gommaire comme heureux pour l'ensemencement du blé, si la lune est favorable [29].

A Laeken se fait chaque année le service solennel pour la première reine des Belges, enlevée à l'amour de sa famille et de son peuple, à Ostende, le 11 octobre 1850.

Le vingt-deuxième dimanche après la Pentecôte s'appelle « Keizerzondag, » dimanche de l'empereur, d'après l'évangile de ce jour [30].

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12 octobre.

(Inula undulata.) Sainte Aurélie;
saint Maximilien; saint Wilfrid.


Jusqu'au commencement du siècle dernier les habitants du bourg d'Ensival continuaient à payer au mois d'octobre un droit nommé la côte d'avoine, établi pour subvenir aux frais d'entretien d'une compagnie de gendarmes, destinée à purger le pays des brigands qui l'infestaient. La même commune, dans laquelle l'évêque Ferdinand de Bavière érigea, en 1657, une cure particulière, nous offre par l'élection de ses curés un usage tout à fait curieux dans des temps encore si près de nous.

Les principaux du bourg, dit l'auteur des Délices du pays de Liége, après avoir assemblé le peuple dans une place que partage un petit ruisseau, lui présentaient successivement les ecclésiastiques aspirants. A chaque présentation, ceux à qui le sujet était agréable sautaient de l'autre côté du ruisseau, et par ce moyen donnaient leurs voix, de façon que le prétendant qui avait eu pour lui le plus grand nombre de sauteurs, était élu curé d'Ensival [31].

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13 octobre.

(Helenium autumnale.) Saint Édouard; saint Théophile.


A Liége se célébrait autrefois, dans la cathédrale, un office particulier sous le rite duplex en mémoire de la victoire signalée, que les Liégeois remportèrent à pareil jour, l'an 1213, sur les Brabançons dans la plaine de Steppes, et les bouchers, ayant contribué pour beaucoup au gain de cette bataille sanglante avaient, en récompense de leur bravoure, le droit de sonner ce jour-là les cloches de la cathédrale [32].

Le même jour se célébrait autrefois l'anniversaire de la consécration de la vieille chapelle voisine de Crayenhoven près de Bruxelles, et on y voyait autrefois, ce jour-là, un grand concours de monde; des boutiques de boissons et de pain d'épice s'élevaient aux alentours et des scènes de débauche souillaient d'ordinaire la fête commencée avec les dehors de la piété; c'est ce qui détermina l'autorité diocésaine à défendre de célébrer le service divin à Crayenhoven, en 1830.

Cependant un grand nombre de pèlerins y viennent encore, presque toujours de grand matin, y invoquer l'intercession du saint Landre, qui est le patron de la chapelle et y recueillir l'eau d'un puits qui, dit-on, guérit de la fièvre. Aussi n'est-il pas rare de voir des jarretières attachées à la porte d'entrée, parce que de cette manière, à ce que l'on dit, on parvient à lier la fièvre. Car si l'on en croit la tradition, le saint Landri ou Lendrik, que l'on dit avoir été évêque de Meaux, fils de saint Vincent, fondateur du chapitre de Soignies, et de Sainte-Waudru, fondatrice du chapitre de Mons, aurait habité le château de Crayenhoven, d'autres racontent que, s'étant égaré dans ces lieux, le chant du coq lui aurait appris qu'il était peu éloigné d'une habitation. Il se serait reposé à l'endroit même où depuis on lui éleva une chapelle, qui en 1667 fut rebâtie, et c'est pourquoi, jadis, on voyait sur l'autel un coq chantant à côté de la statue du saint qui a été volée il y a quelques années.

Aussi, suivant quelques vieux paysans, reconnaissait-on jadis, à la vigueur des céréales les endroits où ce saint vénéré avait passé.

L'abbé de Dilighem consacra l'édifice le 13 octobre 1669.

Un ruisseau dans les environs porte, dans quelques actes, le nom de « Lenterixbeke, » ruisseau de Landri [33].

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14 octobre.

(Inula indica.) Saint Calixte, pape; saint Donat ou Donatien.


Saint Donat, en l'honneur duquel huit églises sont consacrées, est patron de la ville de Bruges.

En Flandre, où l'on croit encore ça et là que le tonnerre n'est autre chose que le bruit que font des anges déchus en planant dans les airs, on récite, quand il tonne, les litanies de saint Donat afin de se préserver de tout malheur.

La même chose se faisait autrefois en Brabant [34].

A Mons on se rendait autrefois à la chapelle de Saint-Calixte, au château, où l'on célébrait l'anniversaire de la délivrance du château de la ville. Au neuvième siècle, lors des invasions des Normands, Régnier au long col, comte de Hainaut, fortifia sa résidence de manière à pouvoir résister à ces barbares. En 881, lorsque ceux-ci se répandirent dans le pays, les religieuses du monastère de Sainte-Waudru, leurs serfs et quelques habitants des environs cherchèrent un refuge sous le donjon seigneurial. Régnier, voulant conserver les reliques des saints et les châsses qui les contenaient, les fit apporter à Mons, et déposer dans la cave du château; le comte en fit murer l'entrée, afin de soustraire ces trésors aux Normands, s'ils s'étaient emparés de sa forteresse.

Le château de Mons échappa aux ravages de ces pillards, et cette délivrance fut attribuée aux saints dont les reliques s'y trouvaient cachées.

Le souvenir de cet événement fut conservé au château, ainsi qu'au monastère de Sainte-Waudru  : l'anniversaire en était régulièrement célébré. La comtesse Richilde fit construire, en 1051, à la châtellenie, une chapelle dédiée à Saint-Calixte, pape et martyr, et y plaça une relique de ce saint que lui avait donnée sa tante Egberge, abbesse de Neus, sœur du pape Léon IX. Depuis le peuple visita la chapelle du château le jour de Saint-Calixte. L'entrée de la cave, qui avait servi d'asile aux reliques des saints du pays, était surtout l'objet de l'admiration du peuple  : un escalier dont on ne voyait que le commencement, semblait donner accès à d'immenses souterrains; l'imagination du vulgaire toujours trop active en fit une voie pratiquée sous terre de Mons à Saint-Ghislain, et qui aurait été creusée du temps de Sainte-Waudru, pour faciliter les conférences mystiques de cette sainte avec saint Ghislain, son directeur spirituel. Ce pèlerinage, auquel s'attachait un souvenir si merveilleux, attirait des dévôts et des curieux, une foire se tenait à l'entrée du château et formait l'appendice de la fête religieuse. Un autre motif engageait encore les habitants à se rendre au château  : c'était la charité. Dans cette enceinte était située la prison et chacun regardait comme un devoir de faire l'aumône aux pauvres détenus, qui paraissaient derrière de lourds barreaux de fer.

Aujourd'hui ce qui subsiste de la châtellenie est converti en une maison d'aliénés, les prisonniers n'y sont plus et la chapelle de Saint-Calixte n'offre plus qu'un monceau de ruines. Le pèlerinage fut anéanti lors de l'invasion française [35].

A Lierre se fait en ce jour une procession solennelle appelée vulgairement « processie van de Furie. »

Le 14 octobre 1595, à l'aube du jour, la ville de Lierre fut prise par Charles Herangière, gouverneur de Breda, qui ayant réuni un corps d'expédition, fort d'environ neuf cents hommes, mais sans canons, par une marche forcée et nocturne surprit le corps de garde de la porte de Malines et se rendit maître de la plus grande partie de la ville. Le gouverneur espagnol, Don Alonzo de Luna, rassembla en hâte les deux compagnies d'infanterie qui composaient la garnison de Lierre, ainsi que les bourgeois qui accouraient de tous côtés, et se retira pas à pas en combattant vaillamment dans la porte de Bois-le-Duc, alors une sorte de forteresse, assez vaste pour contenir une petite garnison, après avoir préalablement mis le feu aux maisons et habitations de la rue qui conduit à cette porte, et dépêché des courriers à Anvers et à Malines pour prier les commandants militaires et les magistrats de ces deux villes, de venir incontinent à son secours et délivrer Lierre des ennemis du roi et de la religion. Sa demande fut sur-le-champ exaucée et vers une heure de relevée les troupes auxiliaires arrivèrent au secours du gouverneur espagnol qui était encore maître de la porte après avoir vigoureusement repoussé toutes les attaques de l'ennemi. Une fois entrées en ville, elles tombèrent sur les soldats hollandais qui s'étaient éparpillés dans les maisons en vue de les piller et qui, fatigués par suite de la longue marche nocturne et du combat continuel ou ivres du vin qu'ils avaient trouvé dans les caves des riches habitants, prirent la fuite sans faire usage de leurs armes et périrent en grande partie. Leur commandant après avoir, à la tête de quelques braves, résisté pendant quelque temps aux assaillants, sortit de la ville et poursuivant sa route à travers la Campine sans être inquiété, revint à Breda.

L'anniversaire de cette journée, connue sous le nom de « Furie van Lier, » est devenue une fête religieuse  : chaque année une procession solennelle, suivie d'une foule de gens pieux, sort, après la messe, de la collégiale, et arrivée à l'endroit ou jadis se trouvait la porte de Bois-le-Duc, y dépose la châsse en argent, contenant les reliques de saint Gommaire, et place le Saint-Sacrement sur un autel érigé dans ce but. Puis on chante le « Te Deum » suivi d'un hymne religieux en latin [36], pendant que, dans le voisinage, des décharges d'armes à feu se font entendre.

Les trois quarts de la population de Lierre ignorent l'origine de cette fête religieuse, la plupart d'entre eux croient que la procession se fait en actions de grâces, de ce que la ville a été pour lors sauvée miraculeusement, par saint Gommaire, de la destruction dont la menaçait une horde de barbares, qu'on nommait « Noordmannen [37]. »

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15 octobre.

(Centaurea moschi.) Sainte Thérèse.


Sainte Thérèse la réformatrice des Carmélites, est à Aywalle (diocèse de Liége) honorée comme patronne.

Les Apostolines, qui lui doivent leur fondation, ont encore aujourd'hui douze maisons en Belgique, les Carmélites déchaussées en ont quatre.

La fête de sainte Thérèse se célèbre dans tous ces couvents avec grande solennité. A Malines elle se chôme avec octave dans l'église du Béguinage.

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16 octobre.

(Achillœ multifolium.) Saint Gal, abbé; saint Florentin;
saint Séraphin; saint Mummolin.


Le jour de saint Gal on aime à transplanter les rosiers et d'autres arbustes à fleurs. De même on enduit les crevasses des arbres, etc. [38].

A Courtrai c'est le jour après la sainte Thérèse que les artisans commencent à travailler à la chandelle, et célèbrent la festivité appelée « Keerspypbesnyde » qui ailleurs se nomme « Keersbegieten, » et dont nous avons déjà parlé sous la date du 1er septembre.

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17 octobre.

(Helianthus decapetalus.) Sainte Hedwige; saint Florentin.


A Lierre, tous les ans le samedi après la kermesse, suivant une ancienne coutume, les marguilliers de la cathédrale de Notre-Dame d'Anvers avec une châsse contenant le saint prépuce, les têtes des saints Cosme et Damien et quelques autres reliques et accompagnés de plusieurs ecclésiastiques se rendaient à la maison dite « het Meuleken, » sur la Grand'Place où ils trouvaient du logement et un repas préparés pour eux. A la porte d'Anvers le chapitre de Saint-Gommaire les attendait pour les accompagner jusqu'à la maison susdite.

Le lendemain le chapitre de Saint-Gommaire venait prendre la châsse, la portait processionnellement à la collégiale, où se célébrait une messe solennelle et la reportait ensuite de la même manière à la maison, où à midi se donnait un banquet somptueux, auquel assistait aussi le magistrat.

Le lundi les marguilliers retournaient avec la châsse à Anvers. Mais depuis 1570 cette cérémonie a cessé d'avoir lieu [39].

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18 octobre.

(Agaricus floccosus.) Saint Luc; saint Monon.


Saint Monon, martyr vers le milieu du septième siècle, vivait dans la solitude à Nassogne, entre Marche et Saint-Hubert, près d'un sanctuaire qu'il avait élevé en l'honneur de la Mère de Dieu. Sept églises lui sont dédiées et la procession qui se fait en son honneur le dimanche après l'Ascension, attire un grand concours de fidèles.

Saint Luc est le patron des peintres, des sculpteurs en bois et des artistes en général.

A Anvers la gilde de Saint-Luc fait célébrer tous les ans une messe solennelle dans l'église de Saint-André, où l'on honore les reliques du saint qui, grâce au père Jean Delvigne de la société de Jésus, appartiennent depuis 1754 à la gilde.

Cette célèbre gilde de saint Luc, composée de métiers ou « stielen, » qui reconnaissent saint Luc pour patron, remonte à une très-haute antiquité. Une ordonnance du magistrat d'Anvers, donnée pour accommoder quelques différends qui s'étaient élevés entre les peintres et les autres artistes, date de l'an 1382 et cite comme membres de la gilde de saint Luc  : les orfèvres, les peintres, les vitriers et peintres sur verre, les brodeurs, les sculpteurs en bois et les passementiers en argent.

A ces métiers se joignirent peu à peu tous ceux qui avaient quelque rapport avec les beaux-arts, et les ordonnances de 1606 et 1689, ainsi que les statuts de la gilde « de Liggere der gilde, » prouvent que dans le dix-huitième siècle la gilde de saint Luc ne réunissait dans son sein rien moins que trente-cinq différents métiers.

Le nombre toujours croissant des membres fit bientôt songer à donner à la gilde une constitution définitive. Déjà elle avait obtenu du magistrat d'Anvers plusieurs priviléges, et elle voulut, au moyen de l'érection du décanat, que ceux-ci pussent mieux avoir leur effet.

C'est pourquoi on décréta, en 1454, la nomination de deux doyens ou « dekens, » et d'un prince ou « hoofdman, » chef-homme. Jan Severmoke et le peintre Jan Snellaert furent élus doyens, et le jubilé de leur installation est célébré tous les cent ans, avec la plus grande solennité. Car c'est à eux que la ville doit la célèbre école flamande dont les grands maîtres Metsys, Breughel, de Vos, Van Noort, Floris, Jordaens, Van Dyck, Teniers, Quellyn, Schut, Seegers et d'autres, mais principalement Rubens, qui les surpassa tous, ont perpétué la gloire.

A l'égal des autres gildes et métiers, la gilde de saint Luc porte ses armoiries à elle  : trois écus d'argent en champ azur.

Lorsqu'en 1481, la chambre de rhétorique « de Violiere, » se joignit à la gilde de saint Luc, celle-ci adopta la devise de la « Giroflée » « tot jonsten versaemt, » réunie par amour, et aujourd'hui encore on lit ces paroles au-dessous du blason de la gilde de saint Luc.

Deux autres chambres de rhétorique « de Goudbloem, » (souci) et « de Olyftak, » (rameau d'olivier) se trouvaient également sous l'excellente administration des doyens de la gilde de saint Luc et se distinguaient à presque tous les brillants jeux de haies « haeghspelen » ou « landjuweelen, » du quinzième et du seizième siècles. Leurs compositions dramatiques se sont conservées jusqu'à nos jours dans l'ouvrage précieux « Spelen van sinne, » publié en 1562 à Anvers.

Pour mieux enseigner l'art et pour en propager la connaissance, on érigea une école de dessin, c'était le fameux peintre David Teniers le jeune, qui en sollicita la permission auprès du roi d'Espagne, Philippe IV. Grâce à l'intermédiaire du marquis Louis de Caracena, dont on voit encore au musée d'Anvers le buste fait par Artus Quellin le vieux, en signe de reconnaissance de la gilde, on obtint en 1664 des lettres patentes, qui accordèrent la requête.

L'école, qui donna naissance à l'académie célèbre de nos jours était on ne peut plus florissante sous la direction de la gilde de saint Luc dont les membres artistes lui servaient de professeurs; mais en 1741 l'administration ayant passé aux mains du Conseil communal, l'école déclina de plus en plus et la gilde elle-même perdit de jour en jour de son ancienne splendeur.

En 1754, anniversaire de la nomination des premiers doyens (1454), on inaugura avec pompe le nouvel autel que la gilde avait construit dans la cathédrale en l'honneur de saint Luc; mais, en 1773, des difficultés s'élevèrent entre la direction de la gilde et le peintre Lens, qui, après avoir longtemps séjourné à l'étranger, voulut affranchir les artistes du devoir d'entrer dans une corporation dont le seul but était la culture des arts. Il obtint que par un arrêt du gouvernement, en date du 20 mars 1773, l'académie fût séparée de la confrérie. La gilde faillit se dissoudre, mais le magistrat, reconnaissant la grande importance de cette antique association, invita, le 15 mai de la même année, les doyens à reprendre leurs fonctions et à réorganiser la gilde.

Malgré tous les efforts de ces hommes patriotiques, la confrérie affaiblie par l'influence toujours croissante des idées françaises de cette époque, ne reprit pas son éclat antérieur et en 1789, lors de l'invasion française, elle cessa d'exister. Mais dès que les troubles de la révolution furent apaisés, les anciens membres de la gilde se réunirent de nouveau et rétablirent avec solennité la gilde de Saint-Luc le 30 mai 1808.

Elle recommença à prospérer et son règlement, de l'an 1851, énumère trente-cinq différents métiers faisant partie de la gilde.

L'année 1854 vint lui donner une nouvelle vie. Elle voulut fêter dignement le quatrième jubilé de l'installation de ses doyens. Un « landjuweel » fut célébré avec une pompe qui surpassa toutes les fêtes littéraires données jusqu'à ce jour à Anvers. Plus de trois mille artistes, littérateurs et amateurs des beaux-arts assistèrent au concours qui eut lieu, le 21 août, au Théâtre-Royal.

Un « Te Deum » solennel fut chanté dans la cathédrale et le nouvel autel de Saint-Luc fut inauguré en présence des autorités civiles et ecclésiastiques.

En souvenir de ce jubilé, la division littéraire de la Société publia un album magnifique [40].

A Bruges, la gilde de Saint-Luc, dont l'institution remonte probablement au commencement du quatorzième siècle, avait coutume, d'exposer chaque année, le jour de sa fête patronale, deux tableaux de Van Eyck et de Lancelot Blondeel. La chapelle de la gilde, dont la première pierre fut posée en 1450, a été vendue le 27 avril 1798 [41].

L'église d'Anderlecht payait anciennement tous les ans le jour de saint Luc un cens de 2 sous 6 deniers à la cathédrale de Cambrai, en vertu d'une donation de l'évêque Burchard, en date de l'an 1123, qui exempta la dite église de toute redevance et de toute exaction sauf ce cens [42].

A Malines se célébrait autrefois la fête de la Translation de saint Rombaud. A cause d'une guerre on avait transporté en 1148 les reliques du saint de Malines au village de Steenockerzeel. Dans les comptes de la ville de 1321 on trouve déjà: «sint Rombouds dach » entre la Saint-Denis et le jour de saints Siméon et Jude [43].

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19 octobre.

(Coreopsis procosa.) Saint Pierre d'Alcantara;
saint Aimable; saint Savinien.


A Bruxelles la seconde des deux foires franches, que Maximilien accorda à la ville [44], devait commencer le jour après la Saint-Luc.

Ces foires qui avaient lieu sur la Grand'Place, furent transférées en 1833 au Grand Sablon et abolies en 1840 toutes les deux.

Sous le directoire (an VII) une foire du 18 octobre jusqu'au 4 novembre devait remplacer celles existant antérieurement [45].

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20 octobre.

(Centaurea suaveolens.) Saint Jean Cantius;
saint Caprais; saint Félicien.


Le mardi après la Saint-Luc, devait commencer à Termonde la foire franche de trois jours que Philippe le Hardi, gendre de Louis de Mâle, accorda à cette ville en 1397. Mais à cause des foires qui, à Bruxelles et à Beveren, avaient lieu vers la même époque, Charles V transféra cette foire, en 1550, au vendredi après le premier samedi d'octobre, pour durer jusqu'au mardi suivant.

L'un et l'autre de ces princes accordèrent à la ville le privilège que, durant la foire et les huit jours avant et après, chacun serait libre d'entrer en ville et d'en sortir, à l'exception toutefois des traîtres, des bannis, des déserteurs et des débiteurs des princes [46].

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21 octobre.

(Silphium asteriscus.) Saint Hilarion; sainte Ursule.


Sainte Ursule, en l'honneur de laquelle quatre églises sont consacrées, est la patronne des religieuses qui portent son nom et qui se vouent à l'éducation de la jeunesse. Autrefois les Ursulines avaient des pensionnats dans la plupart des grandes villes belges. Aujourd'hui, selon le savant auteur du « Calendrier belge de la sainte Vierge, » il n'existe plus de l'ancienne congrégation que la maison de Mons. Mais une nouvelle association d'Ursulines s'est formée depuis peu d'années en Belgique, dont la maison-mère est à Thieldonck et qui compte déjà quinze établissements [47].

A Malines, se célèbre, le même jour, l'anniversaire de l'érection de la confrérie de Sainte-Barbe dans l'église de Saint-Jean-Baptiste.

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22 octobre.

(Silphium trifoliatum.) Sainte Cordule; sainte Alodie;
saint Sevère; saint Mellon; saint Albert.


Sainte Cordule est la patronne de Schooten, village du diocèse de Malines.

A Anvers les tisserands célèbrent la fête de saint Sevère, leur patron, dont les reliques s'honorent en partie dans l'église de Saint-Jacques à Anvers [48].

Saint-Albert, patron des paysans, de même que saint Gommaire et saint Gal, bénit, à ce qu'on dit, en bonne et mauvaise lune [49].

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23 octobre.

(Aster flexuosus.) Saint Hilarion; saint Séverin; sainte Ode.


Sainte Ode, tante de saint Hubert, morte en 711, dota richement la collégiale de Notre-Dame, que celui-ci érigea sur la tombe de son prédécesseur saint Lambert. On lui attribue aussi la fondation de Notre-Dame de Namur. La fête de son saint directeur, Pompée, se célèbre aussi en ce jour [50].

A Gand, où l'abbaye de Saint-Bavon possédait anciennement dans la paroisse de Rysbergen (mairie de Bréda) une petite seigneurie appelée Zombeecke, qui fut achetée en 1523 par Henri, comte de Nassau, seigneur de Bréda, les hommes du fief de cette seigneurie étaient tenus de donner annuellement à leur seigneur, le soir de la fête de Saint-Séverin, un beau repas composé de tous les mets de la saison. Douze hommes dont six à cheval devaient assister à ce festin, et les tenanciers fournissaient de la paille, de l'avoine et du foin pour les chevaux. Les six hommes à pied pouvaient amener avec eux des chiens, et des oiseaux de chasse, auxquels devait également être fournie la nourriture. Les six cavaliers avaient à leur repas six quarts de vin et trois à leur coucher. On préparait un semblable repas le lendemain vers le soir, lorsque les douze invités partaient pour le village de Zundert, frontière de la mairie de Bréda [51].

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24 octobre.

(Aster junicus.) Saint Evergiste; salut Raphaël, archevêque.


A Malines les tisserands, les fileurs et les sergiers, célébraient la fête de Saint-Séverin, leur patron, par une messe solennelle dans l'église de Saint-Rombaud.

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25 octobre.

(Aster miser.) Saints Crépin et Crépinien.


Jour heureux pour les cordonniers, les selliers, les tanneurs, etc. [52].

Les cordonniers qui honorent saint Crépin et saint Crépinien comme patron, célèbrent ce jour très-solennellement.

A Bruges, où le métier des cordonniers réunissait dans son sein plusieurs autres petits métiers, entre autres les gantiers ou « Meulenmeerschers, » on dépensait deux livres pour célébrer dignement la fête patronale et huit livres pour la réunion qui avait lieu le jour du renouvellement des doyens [53].

A Diest le jour de fête des cordonniers, un apprenti habillé en évêque est placé le soir au vitrage du magasin brillamment éclairé; il se pose comme s'il allait se mettre à couper du cuir et doit rester ainsi toute une heure sans se mouvoir.

A Malines les apprentis des cordonniers avaient autrefois la coutume, de travestir l'un d'entre eux en évêque et de parcourir les rues pour quêter quelque chose en chantant devant les maisons des pratiques de leurs maîtres.

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26 octobre.

(Solidago petiolaris.) Saint Evariste; saint Rustique.


Le dernier dimanche d'octobre se fait à Courtrai une espèce de kermesse appelée vulgairement « Schenkelkenskermis » ou « Schynkelfeest. »

Cette fête, qui se célèbre dans le quartier dit « Over de Leye » (au delà du Lys), fut instituée par Denis de Schynkele, seigneur de Stierbeke, échevin et puis (de 1702 à 1724) bourgmestre de la ville de Courtrai [54].

En souvenir du fondateur, on place encore chaque année son buste, bien décoré de fleurs et de feuillage, au milieu de la rue principale du susdit quartier.

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27 octobre.

(Aster floribundus.) Saint Frumence;
saint Armand; saint Florent; sainte Sabine.


Saint-Florent est patron de deux églises.

A Malines se célébrait autrefois une fête en mémoire de ce que les reliques de Saint-Rombaud, transportées à Steenockerzeel à cause des troubles de la guerre, furent heureusement ramenées à l'église dédiée à ce saint [55].

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28 octobre.

(Aster passiflorus.) Saints Simon et Jude, apôtres.


C'est un jour de triste mémoire pour la ville d'Iseghem.

En apprenant qu'une petite colonne française marchait de Roulers par Cachtem, Emelghem et Ingelmunster à Courtrai, les habitants d'Iseghem s'armèrent au hasard de tout ce qu'ils trouvaient sous la main, l'un d'un fusil, l'autre d'une épée, d'autres encore de bâtons ou de fourches, et attaquèrent les ennemis. Ils les mirent en fuite et les poursuivirent jusqu'aux portes de Courtrai; mais les Français ayant reçu des renforts, rebroussèrent chemin, prirent Iseghem par surprise et se vengèrent des habitants en passant au fil de l'épée tout ce qu'ils rencontraient.

Comme c'était précisément un dimanche, on appelle ce jour encore aujourd'hui « Brigandszondag, » dimanche des brigands [56].

A Mons les poissonniers célébraient, ce jour, leur fête patronale.

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29 octobre.

(Narcissus viridiflorus.) Sainte Ermelinde;
saint Narcisse: saint Faron.


Sainte Ermelinde, en l'honneur de laquelle deux églises sont consacrées, naquit de parents nobles et riches près de Tirlemont. Dès son enfance elle s'adonna au service de Dieu et choisit Jésus pour son époux. C'était en vain que ses parents l'engageaient à se marier; ils ne purent la détourner de son idée ni par prières ni par menaces. Elle se coupa les cheveux, quitta ses parents qui lui avaient donné les rentes d'une propriété pour s'en entretenir et se retira près d'un village dit alors Bevegne où elle vaquait jour et nuit aux œuvres de piété et aux prières. Toutefois sa beauté enflamma deux frères d'une telle passion qu'après avoir vainement essayé tous les moyens de la séduire ils résolurent de l'enlever de nuit quand elle irait à l'église. Mais la veille de la nuit destinée au rapt, un ange l'avertit de ne pas aller à l'église comme d'habitude et la conduisit à Meldert où elle continua sa vie d'abstinences et d'austérités, jusqu'à ce que le 29 octobre de l'an 600, Dieu la rappela de la terre.

Son corps demeura longtemps en terre sans aucun honneur, bien que plusieurs miracles illustrassent cet endroit. Enfin le duc Pépin, père de sainte Gertrude, fit élever les reliques et fonda sur le lieu du tombeau un couvent de religieuses [57].

A Meldert, où sainte Ermelinde est honorée comme patronne, son jour de fête se célèbre très-solennellement et attire un grand concours de pèlerins.

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30 octobre.

(Agaricus fimetarius.) Saint Foillan; saint Lucain; sainte Zénobe.


Saint Foillan ou Feuillein, auquel sept églises sont dédiées, est patron de Fosses.

Ce fut, dit-on, un missionnaire écossais, à qui sainte Gertrude  avait donné son domaine de Fosses et qui aurait été massacré en 655 ou 657.

Au temps de l'invasion normande, son corps aurait été enlevé de Fosses, mais soustrait par la piété de quelques fidèles, au péril d'être profané par les barbares, et déposé pendant un siècle dans une grotte appelée la Grande-Église.

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31 octobre.

(Corcopsis ferulefolia.) Saint Quentin. Vigile. Jeûne.


Saint Quentin est très-vénéré en Belgique, vingt-cinq églises sont consacrées sous son nom et les villes de Hasselt et de Péruwelz l'honorent comme patron.

A Mons les orphelins sont sous sa protection particulière.

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[1]      De Smet, M. d. M., p. 13-4!5; De Coussemaker, p. 148; Gazet, pp. 36-78. Lokeren, p. 10.
[2]      Dierickx, t. II, pp. 436-390.
[3]      Avontrood, Mss., pp. 35-36.
[4]      Schayes, p. 204.
[5]      De Smet, p. 13.
[6]      Diest, t. 1, pp. 228-230.
[7]      H.d.E.d.B., t. I, 379-380.
[8]      De bode van Kortryk en de landheer van Spiere in 1351, door Mussely Boudewyn. De vlaemsche stem, t. II, pp. 248-255.
[9]      H.d.E.d.B ,t. II, pp. 68-69.
[10]    Vasse, pp. 55-58.
[11]    Cornet, p. 265; Schayes, p. 154.
[12]    Salgues, t. I, p. 151.
[13]    Recherches sur les anciennes fêtes namuroises, par J. Borgnet, pp. 51-64.
[14]    Gazet, pp. 297; 345, Chotin, Monuments de Tournai, p.4.
[15]    Dierickx, t. II, pp. 258-259.
[16]    Ce dernier pouvoir est également attribué à certains maréchaux vétérinaires, dans lesquels on a la plus grande confiance. Ils se rendent seuls dans les étables, en ferment les portes, y prononcent quelques paroles mystérieuses et font des aspersions avec de l'eau bénite.
                Ils sont aussi fort recherchés pour faire disparaître les chenilles des champs et consultés pour les maladies de langueur des enfants que l'on croit ensorcelés.
[17]    Notice historique sur l'ancien chapitre de chanoinesses nobles de Munsterbilsen. Gand, 1849, pp. 11-43-44.
[18]    Cornet, pp. 250-251.
[19]    Arm Trienken » door J. Brouwers, Thienen, 1853, p. 108.
[20]    Cornet, pp. 250-251.
[21]    B.M., pp. 210-211.
[22]    Coremans, p. 89.
[23]    Saint-Denis, lez-Gembloux (province de Namur); Saint-Denis, lez-Mons en Hainaut et Saint-Denis-Westrem, en Flandre-orientale.
[24]    Gazet, p. 65; H.d.l.V.d. Saint-Ghislain, pp. 210-212.
[25]    Fêtes populaires à Mons, par F. Hachez. Gand, 1848, pp. 21-22.
[26]    Gazet. p. 354-5; Lom, pp. 1-16.
[27]    Avontroodt, Mss, pp. 37-38.
[28]    Leven, deugden ende mirakelen van den edelen Ridder ende glorieuzen beleyder den heyligen Gummarus te Antwerpen; Lom, pp. 129-329-330; 225-233: Munke, p. 205.
[29]    Coremans, p. 89.
[30]    Coremans, p. 44 .
[31]    Délices du pays de Liége, t. III, p. 262.
[32]    Bovy, t. I, pp. 216-217; Moke, t. II. p. 66.
[33]    H.d.E.d.B., t. II, pp. 399-400.
[34]    Muzenalbum, 1843, pp. 71-76.
[35]    Fêtes populaires à Mons, par F. Hachez, Gand, 1848, pp. 22-23.
[36]    Bellator fortis Gummare,
                Nostrorum timor hostium,
                Tuum semper defende populum
                Contra impetum inimicorum,
                Da gratiam, da gloriam,
                Et inter arma bellorum
                Cives tuos protege
                Laeta clientes tuos exhilarans victoria.
        v. Benedicamus Patrem et Filium cum S. Spirite
        r. Laudemus et superexaltemus eum in sæcula.
        Oremus, etc.
[37]    Avontroodt Mss., pp. 38-39; De Furie van Lier. Lier, 1840; De stad Lier door de rebellen verrast ende door de borgers van Mechelen ende van Autwerpen ontset. Mechelen, 1781, pp. 13-20, 30-31, 129.
[38]    Coremans, p. 89.
[39]    B.M., p. 218.
[40]    De Sint-Lucas gilde en het jubeljaer, door P. Génard. Antwerpen, 1855. Almanak der Sint-Lukas gilde voor 1854. Antwerpen, pp. 13-15, 26-27. Sint-Lukas gilde binnen Antwerpen. Catalogue des œuvres d'art exposées pour l'achèvement de l'autel de Saint-Luc. Anvers, 1855, pp. 9-12.
[41]    Gaillard, pp. 160-164.
[42]    H.d.E.d.B., t. I, p. 24.
[43]    Munk, pp. 142-144.
[44]    Voyez 19 mai.
[45]    H.d.l.V.d.B., t. I, p. 300.
[46]    Maestertius, pp. 11, 81.
[47]    B.M., p. 220.
[48]    Het leven van den H. Severus, bisschop van Ravenna, patroon der lyn- en wollewevers. Antwerpen, 1767.
[49]    Coremans, p. 89.
[50]    B.M., p. 222.
[51]    Le Polygraphe belge, 1835, p. 117.
[52]    Coremans, p. 89.
[53]    Gaillard, pp. 129-135.
[54]    Gaillard, Bruges et le Franc, t. I, p. 313.
[55]    Munk, pp. 142-145.
[56]    Geschiedenis van Iseghem. Rousselaere, 1852, p. 86.
[57]    Gazet, pp. 328-329.


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