DIEUX DU NORD Les mégalithes de Wéris


La Pierre Haina à Wéris

LES MÉGALITHES DE WERIS

Les monuments mégalithiques, dolmens, menhirs, cromlechs, sont les témoins d’une civilisation relativement évoluée dont l’origine semble, au fil des découvertes, de moins en moins mystérieuse.

La « vague mégalithique » principale aurait eu lieu entre 3000 et 1500 avant notre ère (notons cependant qu'il existe des monuments mégalithiques dont l'érection fut antérieure à cette période). Contrairement à une idée toute faite encore assez répandue, elle ne se limite pas au seul territoire français et plus spécifiquement breton. Des monuments mégalithiques existent en France bien sûr, mais aussi en Espagne, dans le Maghreb, en Corse, à Malte, en Belgique, en Hollande, en Irlande, en Grande-Bretagne, en Suède et au Danemark.

Citons encore les monuments mégalithiques de l’ouest de l’Inde, ainsi que ceux de Corée.

La caractéristique de cette « vague », est qu’elle est limitée, pour ce qui concerne son aire principale, c’est-à-dire l’Europe, aux régions citées ci-dessus. On constate aussi qu’elle touche des pays ayant un accès à la mer ; on peut donc en inférer que les propagateurs de la civilisation mégalithique se sont répandus par voie maritime.

Ce qui semble bien être démontré par la richesse mégalithique des territoires côtiers de ces pays.

Diverses hypothèses ont été émises au sujet de l’origine, notamment géographique, de ces constructeurs de mégalithes. On peut d’ores et déjà éliminer l’origine druidique, et donc celte ; cette hypothèse eut un certain succès jusqu’au XIXème siècle, mais la chronologie des faits et d’autres indices ne lui laissent plus aucune place, encore qu’on ne puisse évidemment pas écarter l’idée d’une « récupération » religieuse de ces monuments par les Celtes et leurs druides… en France ou en Angleterre tout au moins, puisque la Tradition celte ne s’est guère implantée en Belgique ou aux Pays-Bas, ni au Danemark, et encore moins bien sûr dans le Maghreb ou en Asie.

L’hypothèse la plus constructive est, à mon sens, celle de l’origine danoise. 

L’île de Seeland (Sjaelland), où est située la capitale danoise, Stockholm, ne comporte pas moins de 3.500 monuments mégalithiques. Cette île a une superficie de 7.500 kms² (soit l’équivalent d’un quart du territoire belge), et est donc ainsi le lieu au monde le plus concerné par la culture mégalithique. Cette fantastique concentration pourrait donc signaler cette île comme étant le centre de diffusion de la civilisation des mégalithes, ce que confirmeraient aussi – mais sans entrer dans les détails complexes de ce type d’étude – la « théorie des alignements », typique de la géographie mégalithique.

Notons encore à cet égard que la France, fort concernée par cette civilisation, totalise quant à elle un nombre approximatif de 7.000 monuments mégalithiques. On aura ainsi une idée plus précise de l’importance que revêt la présence mégalithique dans l’île de Seeland.

En m’écartant à peine de mon propos, je signalerai que les historiens contemporains s’accordent à dire que le centre premier de diffusion des runes – c’est-à-dire le système d’écriture « magique » des Germano-Scandinaves de l’Antiquité - se trouve également au Danemark… Il est donc possible que cette « civilisation des mégalithes » soit liée à la Tradition nordique ; je n’y insisterai pas, parce que ce n’est somme toute, dans l’état actuel des connaissances, qu’une hypothèse.

Mais qu’elle était l’utilité de ces dolmens, menhirs, cromlechs ?

On a dit – et cela est vrai – que les dolmens étaient des tombes. Mais ce ne sont pas que des tombes : ce sont également des lieux d’initiation, et l’on sait le rapport qui existe, dans toutes les traditions ésotériques ou religieuses, entre l’initiation et la mort. 

Les dolmens et menhirs font également partie d’un système complexe de repérages géographiques et astronomiques, propre à la civilisation des mégalithes. Il faut évidemment associer à cela une dimension religieuse et cultuelle.

Géographie sacrée donc, qui détermine les lieux telluriques forts, mais qui définit aussi des correspondances entre certains lieux terrestres et les étoiles, le cosmos… « Tout ce qui est en haut est comme ce qui est en bas »…

Et qui en outre « calcule » les positions des astres : à des fins religieuses, mais aussi pour la vie de tous les jours, pour connaître les saisons et les temps forts de l’activité humaine. Qu’il s’agisse de Stonehenge ou des dolmens belges – objets de cet article -, il y a une constante : déterminer les temps d’équinoxe et de solstice, ou les levers de soleil intermédiaires qui signalent le temps des semailles, du lever des plantes, de la floraison, de la récolte.

(Faisons une rapide digression : les dates des deux équinoxes, des deux solstices, de l’ensemencement, du lever des plantes, de la floraison et de la récolte, soit huit lieux astronomiques et terrestres, correspondent également aux huit lieux sacrés de l’année dans les traditions nordique et celte).

Il faut ici introduire le menhir, pièce importante, et peut-être la plus importante, de la géographie sacrée de cette civilisation. 

On a dit du menhir qu’il était un symbole phallique… De nombreux indices folkloriques semblent bien confirmer cela. Mais, au-delà d’une certaine psychologie qui ne perçoit que la surface des choses  – fussent-elles vraies  -, le menhir est une borne astronomique et géographique. 


Il n’y a pas de menhir isolé. Chaque menhir fait partie d’un ensemble. Intervient donc ici la « théorie des alignements ». Pour signaler une position astronomique (temps de l’équinoxe, du solstice, etc) ou pour indiquer la direction d’un centre sacré, ou encore pour rappeler l’existence d’une ligne de force tellurique, les menhirs sont alignés : ils forment une ligne droite, un « chemin sacré » ; un exemple en est l’alignement des menhirs de Wéris : le premier alignement , en ligne droite, comporte le menhir de Heyd, le menhir de Tour, le menhir de Morville, le dolmen nord (Wéris I), les trois menhirs groupés du Champ de la Longue Pierre, le dolmen sud (Wéris II), et les trois menhirs groupés d’Oppagne. L’orientation de cette « ligne sacrée » est nord nord-est. Je reviendrai dans un article ultérieur sur la signification de cette orientation.

Wéris, proche de Durbuy dans la province du Luxembourg, est souvent considéré en Belgique comme étant « le » lieu mégalithique. Autrement dit, le seul… C’est une erreur. Mais il est vrai qu’il est le lieu mégalithique le plus frappant du territoire belge. Restons-y donc pour le moment.

Outre l’alignement de menhirs et de dolmens dont je viens de parler, il ne faut pas oublier de citer l’alignement secondaire qui relie le menhir d’Ozo et le Thier de Sel, parfaitement parallèle au premier alignement. Il faut aussi évoquer la pièce la plus importante de ce puzzle antique : la Pierre Haina. 

La Pierre Haina ne fait pas, à strictement parler, partie des deux alignements que je viens de citer. C’est qu’en fait, ces deux alignements aboutissent à un lieu sacré dont la Pierre Haina est l’une des composants. Et ce lieu sacré s’étend sur une aire plus large qu’une simple ligne droite. 

La forme géométrique qui caractérise le mieux ce lieu sacré de Wéris – ou ce « plan astronomique et géographique » - est un parallélogramme  marqué en ses angles par le dolmen nord (Wéris I), les menhirs d’Oppagne, la Pierre Saint-Nicolas… et la Pierre Haina ; le premier axe de menhirs formant l’un des côtés du parallélogramme. 

Il faut bien admettre que cette forme, et son orientation, n’a pas encore été parfaitement expliquée. On peut en dire cependant – et ce n’est pas peu de chose -, qu’au solstice d’été (21 juin), on voit depuis les trois menhirs d’Oppagne le soleil se lever derrière la Pierre Haina ; et que le dolmen nord (Wéris I) est aligné par rapport à la Pierre Haina en un axe d’orientation équinoxiale du coucher de soleil au 21 mars et au 21 septembre.

Ce qui par contre est bien plus clair, c’est la ou l’une des destinations de la Pierre Haina. 

Placée donc sur l’une des pointes du parallélogramme, la Pierre Haina, vraisemblablement une roche naturelle, a été un lieu de culte au dieu Thor. Comme le rappelle d’ailleurs le hameau de Tour, situé à quelques centaines de mètres de la Pierre (et à ce propos, on sait le lien qui existe entre Thor et des lieux comme Torgny, Tournai, Thorn, ou les Tournay et Torigni de Normandie, toutes choses dont je parle dans d’autres articles de ce blog ; je noterai encore que Thor, en tant que prénom, se prononce Tour dans les langues scandinaves modernes). 

(L’existence des cultes nordiques, associés aux dieux Odin (Wodan ou Woden), Thor (Thunar ou Donar), Freyr, Freya, etc, est attestée en Belgique par de nombreuses études dont je fais état plus en détail dans les articles regroupés dans la section « Tradition du Nord » du présent blog).

Rien ne prouve évidemment que les concepteurs des systèmes mégalithiques aient  connu et adoré le dieu Thor. En tout cas, les hommes et femmes de la Tradition du Nord, dont les anciens Belges, en ont fait un lieu de culte dédié à leur dieu.

La Pierre Haina a la forme de la rune Thurisaz ou Thurs. Cette rune est associée à Thor, et d’ailleurs plus précisément au Marteau de Thor, Mjöllnir. Elle ne semble pas avoir été érigée de main d’homme, mais peut-être a-t-elle été « retaillée » pour les besoins du culte.  Diverses légendes locales en traitent ; elle serait, par exemple, l’entrée d’un monde souterrain… Tous les ans, de nos jours encore, à l’équinoxe d’automne, elle est peinte en blanc par les habitants de Wéris, ceci, dit-on, afin de purifier la pierre et d’éloigner le diable qui serait le visiteur régulier de ce monde souterrain. On peut supposer ici que cette coutume a été inspirée par le culte chrétien qui remplaça autrefois le culte nordique, dans une tentative – comme en beaucoup d’autres lieux – d’assimiler les anciennes divinités au diable, et, partant, de les mieux « éradiquer ». 

Quoi qu’il en soit, et pour ce qui concerne la Pierre Haina plus précisément, les anciennes divinités semblent bien ne pas avoir totalement disparu, puisque cette Pierre réunit toujours, aux moments des fêtes traditionnelles, divers groupes néo-païens qui honorent leurs dieux dans des rituels hauts en couleurs.

Leif Aegir Thorsson 


Le dolmen Nord à Wéris

La Pierre Haina à Wéris

Le dolmen Sud à Wéris

Groupe de mégalithes aux abords du dolmen Sud à Wéris

Le dolmen Sud à Wéris


AFFICHES "ART NOUVEAU" DE HENRI PRIVAT-LIVEMONT

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